Après la défaite militaire de juin 1940, la résistance à l’occupation allemande et au régime de collaboration de Pétain s’est organisée très progressivement. Aux actions de sabotage des infrastructures pendant les années 41 et 42, ont succédé des attaques armées contre l’armée allemande. La riposte de celle-ci et des organisations de collaboration ont été violentes et sanglantes dès 1943.
Saint-Geyrac n’a pas été un village-martyre comme le fut le bourg de Rouffignac. Que s’y est-il passé les 31 mars et 2 avril 1944? Pour le savoir, cliquer ici.
En octobre 1944, à la demande du préfet Maxime Roux, M. Cousty, instituteur remplaçant, et M. Plazanet, maire, ont rédigé l’historique de l’occupation dans la commune de Saint-Geyracen 1944jusqu’à la libération (Périgueux et ses environs ont été libérés le 18 août 1944). Pour le consulter, cliquer ici.
Des saintgeyracois, qui ont vécu cette période tragique, commentent le récit de M. Cousty. Cliquer ici.
Ces mêmes saintgeyracois témoignent et donnent des précisions sur d’autres évènements qui ont marqué leur mémoire. Cliquer ici.
Le combat a été aussi celui des soldats engagés dans l’armée. Non pas l’armée française battue en mai et Juin 1940, dissoute le 1er décembre 1942, mais l’armée reconstituée en Afrique. Ainsi Gaston Lucien Bastat, (cliquer ici), sergent-chef dans l’armée de l’air à Meknès au Maroc, meurt le 16 août 1944 au Maroc dans l’exercice de son devoir. Deux plaques du souvenir perpétuent sa mémoire, une sur le monument aux Morts de Saint-Geyrac, l’autre dans l’église.
La lutte armée touche aussi les civils. Un jeune saint-geyracois, Maurice Caley, a été tué suite à l’explosion d’un obus. Il est décédé le 16 août 1944. Une plaque à son nom a été apposée sur le monument aux morts de la commune.
BIBLIOGRAPHIE
Histoire de la Résistance en Périgord de Guy Penaud, aux éditions Sud Ouest, sorti en 2013
Le maquis du Périgord dans la deuxième guerre mondiale de Patrick Rolli
Le 1er septembre 1939, tous les hommes valides, âgés entre 20 ans et 48 ans, sont mobilisés au moment de la déclaration de guerre avec l’Allemagne. Au niveau national, cela représente 4 564 000 hommes1, sur une population totale de la France de 41 millions d’habitants; la moitié rejoint les unités combattantes.
La population de Saint-Geyrac, suivant le recensement de 1936, est de 437 habitants; 51 hommes correspondent aux critères de mobilisation, dont 28 sont nés à Saint-Geyrac. Les uns rejoignent les régiments précisés sur leurs fascicules militaires. Les autres, sans affectation, sont démobilisés dès octobre 1939 (blessés de la guerre 14-18, pères de familles nombreuses, classes2 1909, 1910, 1911…).
Le tableau ci-après présente des hommes mobilisés en 1939, nés à Saint-Geyrac, qui furent faits prisonniers en 1940 :
Etat-civil
nom et prénom
date et lieu de naissance
âge au 1/09/1939
résidence
profession en 1939
Auzy André
08/01/1902 St Geyrac
37 ans
le bourg
maréchal
Beau Auguste
08/08/1901 St Geyrac
38 ans
Leyssioutet
agriculteur
Beaupuy André Jean
20/10/1903 St Geyrac
36ans
la Croix-Bordière
agriculteur
Lamégie Pierre Justin
19/02/1909 St Geyrac
30 ans
la Basse Fosse
menuisier
Paris Lucien
01/01/1913 Vélines
26 ans
école de St Geyrac
instituteur
Reynet Maxime Léo
05/12/1916 St Geyrac
23 ans
militaire
Ribette Bertin
21/06/1907 St Geyrac
32 ans
Ribette Emile
28/07/1914 St Geyrac
25 ans
Ribette Jean (Marcel)
6/09/1909 St Geyrac
30 ans
la Coquellerie
agriculteur
Ribette Raymond
04/12/1915 St Geyrac
24 ans
Le 3 septembre 1939, la France et l’Angleterre déclarent la guerre à l’Allemagne hitlérienne.
Le 8 septembre, la France lance une offensive militaire en Sarre, province allemande voisine de la Lorraine. Dès le 30 septembre, les unités engagées se replient: c’est le début de « la drôle de guerre »; il n’y aura plus de combats jusqu’en mai 1940.
Le 10 mai 1940, la Wehrmacht, l’armée allemande, attaque et contourne la ligne Maginot3. Le 14 juin, elle est à Paris! C’est la débâcle de l’armée française: 1 600 000 soldats français sont faits prisonniers et conduits dans des camps (Stalags ou Oflags).
Le tableau ci-après, encore incomplet, liste les prisonniers saintgeyracois. Ceux-ci ne doivent pas être oubliés et méritent le respect et la reconnaissance. Vous pouvez nous faire parvenir les informations manquantes à l’adresse suivante: CIS/ maison des associations/24330 Saint-Geyrac ou à cis24association@gmail.com
Etat militaire
Au-delà de la classe 1921, les fiches militaires ne sont pas numérisées. Seule la consultation des livrets militaires permet de compléter le tableau ci-dessous. Appel est donc lancé aux familles qui auraient conservé ce document. ( mail: cis24.association@gmail.com)
nom et prénom
classe
date de mobilisation
statut militaire
fait prisonnier le à
lieu de détention
Auzy André
1922
caporal 2e cl 612e RP
stalag XI B Fallensbostel
Beau Auguste
1921
01/09/1939
2e classe
21/06/1940 Epinal (Vosges)
stalag XIII A Nuremberg
Beaupuy André Jean
1923
1e cl 49e train
St Florentin (Yonne) Stalag XB Sandbostel
Lamégie Pierre Justin
1929
sergent chef 50e RI
Melun (Seine et Marne)
Paris Lucien
1933
Stalag IV A Elsterhorst (Saxe)
Reynet Maxime léo
1936
sous- lieutenant
Oflag IV D Elsterhorst
Ribette Bertin
1927
01/06/1940
Stalag I A Stablack (Prusse)
Ribette Emile
1934
2e cl 126e RI
Stalag IV A Elsterhorst
Ribette Jean (Marcel)
1929
2e cl 220e RI
Stalag VII B Memmingen
Ribette Raymond
1935
2e cl 2e RA
Stalag VI C Baldhorn-Emsland
Sources
Dénombrement de la population de Saint-Geyrac de 1936 – AD
Recensement militaire, archives de Saint-Geyrac
Fiches militaires – AD
Listes officielles des prisonniers français d’après les renseignements fournis par les autorités militaires allemandes – Gallica-BNF
Bibliographie
Los Embarbelats – Jean Jacques GILLOT, Francis-André BODDART, Guy-Francis LACHAPELLE DU BOIS. Impression SEPEC Numérique
Résistants du Périgord – Jean-Jacques GILLOT, Michel MAUREAU. Edition du SudOuest
La Dordogne dans la Seconde Guerre mondiale – sous la direction d’Anne-Marie Cocula et de Bernard Lachaise. Editions Fanlac
Notes:
1 Ce chiffre est tiré de l’ouvrage la Dordogne dans la seconde guerre mondiale sous la direction d’Anne-Marie Cocula et de Bernard Lachaise, Editions Fanlac
2 La classe militaire est l’année où le conscrit a 20 ans. 3 La ligne Maginot est l’ensemble des fortifications construites entre 1927 et 1936 près de la frontière avec l’Allemagne.
Autres notes: un Stalag est un camp de prisonniers en Allemagne; un Oflag est un camp de prisonniers réservés aux officiers.
Après la débâcle de l’armée française en juin 1940, un million six cent mille soldats sont faits prisonniers et beaucoup sont répartis dans des camps en Allemagne (Stalags).
« … un rapport de la préfecture daté de 1947 qui fait état de 13789 Périgourdins ayant été, plus ou moins durablement, prisonniers de guerre en Allemagne, soit au moins 25% des hommes du département … »1.
Parmi ceux-ci, plusieurs sont de Saint-Geyrac.
Auguste Beau en fait partie ; il a passé , durant les 2 guerres mondiales, presque 8 ans de sa vie hors de sa famille et de sa ferme !
Photo en avant-plan prise dans le cimetière de Saint-Geyrac
Après la guerre de 39-45, une plaque a été apposée sur la stèle du Monument aux Morts de Saint-Geyrac pour perpétuer le souvenir de GASTON LUCIEN BASTAT, mort pour la France.
L’historique de ce monument a été établi par Josette Galinat (le monument aux morts).
Une autre plaque y a été ajoutée pour ne pas oublier une victime civile : Maurice Caley, mort à 14 ans, le 16 août 1944.
Sergent-chef, pilote dans l’armée de l’air à la base aérienne de Meknès au Maroc, Gaston Lucien Bastat est décédé le 10 novembre 1944 en service commandé.
Photo (Archives privées)
Né le 5 juillet 1912 à Houdan dans les Yvelines, il est décédé à 32 ans. Il s’était marié le 14 septembre 1940 à Saint-Geyrac avec Léonie Loubiat (dite Lucienne) née à Lauzelie en 1914.
Elle était la cadette d’une nombreuse fratrie:
Léontine ( 1895/1979)
Léon (1899/1984)
Jean (1902/1902)
Louis (1905/1958)
Louise (1907/1994) qui épousa en 1926 Joseph Coulaud, bien connu à Saint-Geyrac
Lucien (1911/?)
On peut lire l’acte de décès, transcrit par le maire de St Geyrac, M. Renaudie.
Transcription de l’acte de décès
Bureau du Territoire de Meknès
Le 10 novembre 1944 à 9h30, est décédé aux Ait-Raho, Gaston Lucien Bastat, né le 5 juillet 1912 à Houdan (Seine et Oise), sergent-chef/ pilote à la base centre d’instruction de chasse à Meknès, domicilié à Saint Geyrac (Dordogne), français, pupille de la nation, fils d’Albert Bastat et de Albertine Reine Alexandrine Dubois, sa veuve, sans profession, domiciliée à Bayonne, Basses-Pyrénées, époux de Lucienne Léonie Loubiat, française domiciliée à Saint Geyrac, décédé aux Ait-Rahot.
Mort pour la France
Dressé le 10 novembre 1944 à 17h sur la déclaration de Marcel Boitet, lieutenant officier d’état civil de la base d’instruction de chasse de Meknès, français domicilié à Meknès, décoré de la croix de guerre et de la médaille militaire, non parent du défunt, qui lecture faite, a signé avec nous, Jean Léon Pierre Dutheil, Chevalier de la Légion d’Honneur, décoré de la Croix de Guerre, contrôleur civil chef du territoire de Meknès, officier d’état civil.
Pour extrait certifié conforme
Meknès, le 8 septembre 1945
Le contrôleur civil chef du bureau du territoire,
Signature (illisible)
L’acte de décès ci-dessus a été transcrit le 25 septembre 1945, 4h du soir, par Nous, Renaudie Théophile, Maire de Saint Geyrac,
signature
Document original
Plaque apposée sur sa tombe au cimetière de Saint-Geyrac
Voici le témoignage de Mme Ginette Pagès, née Houlot, recueilli par Josette Galinat en 2011.
Je suis née le 21 avril 1925 à Hallignicourt, près de St Dizier en Haute-Marne. Je quitte mon village en compagnie de mon père, M. Gabriel Houlot âgé alors de 51 ans, de ma sœur déjà mariée accompagnée de ses 2 enfants. Ma mère est décédée lorsque j’avais 6 ans.
On a marché pendant 2 jours. Des soldats nous ont récupérés vers Neufchâteau dans les Vosges. Dans le camion à ridelles qui nous transportait, d’autres personnes fuyaient la guerre comme nous. On couchait dans des granges. Ma sœur allait traire des vaches pour faire boire ses gamins.
Le premier « pain » qu’on a eu, c’était en Corrèze. On nous a déposés à St Geyrac le 18 juin 1940.
A l’arrivée, j’ai pleuré abondamment en découvrant ce petit village aux vieilles maisons.Je ne voulais pas rester…
On nous a embarqués à nouveau et nous sommes arrivés au Bugue. Le maire du Bugue refusa de nous garder, car il y avait beaucoup de réfugiés et plus de place pour nous. On repartit donc à St Geyrac.
A St Geyrac, nous avons été logés dans la cantine qui en fait était la 2e classe. Nous y sommes restés un mois.
Le récit se poursuit ainsi :
Dès le lendemain de l’arrivée, M. Gabriel Houlot se rend à la mairie pour se procurer des cartes de ravitaillement. Elles sont nécessaires pour acheter de la nourriture. Mais la mairie n’en a plus. M. Savy, le boulanger, lui prête un vélo et Gabriel se rend à la préfecture à Périgueux.
Carte d’alimentation pour enfant
Là, un responsable prend contact avec la mairie de St Geyrac et finalement celle-ci va délivrer à M. Houlot les cartes tant réclamées.
La famille Houlot est ensuite logée chez M. Chadrou. Pour faire vivre sa famille, M. Houlot travaille chez les uns, chez les autres comme ouvrier agricole. Et Ginette aussi.
Le dimanche, l’abbé Samsoën, demeurant à la Cotte chez son frère le docteur Samsoën vient dire la messe à l’église de St Geyrac. Marie-Rose Pauly, bonne musicienne, joue de l’harmonium et Mme Labrue chante. Ginette Houlot assiste à la messe. Venant d’une famille pieuse, Ginette chantait en latin et faisait l’admiration de tous. Mme Labrue la convie à venir chanter avec elle et ainsi, petit à petit, la famille Houlot s’intègre à la population locale.
En 1943, la famille déménage à la Grèlerie ; le propriétaire est M. Vincent, marchand de vin à Bordeaux. La famille loge sur place ; M. Houlot devient métayer.
Ginette épouse M. Robert Pagès en 1943 ; Guy naît en 1944 à la Grèlerie.
Monsieur et madame Pagès s’installent en 1945 « chez la cocotte » Le couple achète plus tard la maison en bordure de la route départementale, à l’entrée ouest du bourg.
Précisions :
Hallignicourt est une petite commune rurale du département de la Haute-Marne. Elle comptait 261 habitants en 1946.
M. Houlot a terminé sa vie à St Geyrac ; il est décédé le 20 mai 1961 à St Geyrac.
Ginette Pagès, née Houlot, a eu 3 enfants. Elle est décédée le 24 février 2012 à St Geyrac.