Un trésor inestimable

Dans son numéro 56 de 2006 voici comment la revue « Le Festin  » annonce ce trésor!

et maintenant le voici :

un primitif italien du Trecento de Simone di Filippo, dit Simone de’ Crocefissi

Extrait du catalogue de l’exposition du musée des Beaux -Arts de Tours

Saint Geyrac concerné par une telle merveille ?

Marie Bernières- Henraux devenue par son second mariage Madame Gaillard-Lacombe meurt le 30 janvier 1964. Le 31 janvier, le Notaire ouvre le testament du 12 février 1958.

Les héritiers sont au nombre de 5, plus sa fille Simone qui, du fait de son handicap profond est représentée par un administrateur judiciaire.

 Un des héritiers reçoit à la prisée du 28 avril 1964   dans l’appartement loué à Périgueux,  tous les objets mobiliers, bijoux, argenterie, tableaux, effets nets de frais et de droits.

Y figure au « n° 156 un panneau couronnement de la vierge 1000f »

Toutes les revues indiquent que c’est Madame Gaillard-Lacombe qui en a fait don. Ce document tend à prouver que ce panneau est arrivé à Saint Front par l’intermédiaire d’un héritier.

Peu importe, il est allé entre de bonnes mains qui l’ont amené à être classé au titre des Monuments Historiques le 27 mars 2000.

Il fut exposé au Musée des Beaux Arts de Tours lors d’une exposition intitulée « Autour de Lorenzo Veneziano-Fragments de polyptyques vénitiens du XIVe siècle »  du 22 octobre  2005 au 23 janvier 2006.

Il y est présenté ainsi :

Simone di Filippo, dit Simone de’ Crocefissi

Bologne. Actif à partir de 1355. Mort en 1399

Le couronnement de la vierge

Tempéra et or sur bois ( peuplier) ( ndlr -tempéra : le liant des pigments est une émulsion à base de jaune d’œuf)

H0.895m    L 0.497m

Inscription Monuments Historiques le 27 mars 2000

Périgueux Cathédrale Saint Front.

La revue « Le Festin » n°56 nous donne quelques renseignements importants sur :

Simone de’Crocefissi

 » Ce maître du Trecento (ndlr- XIVe siècle) est l’auteur d’un autre « couronnement de la vierge » analogue, aujourd’hui conservé en Italie dans une collection particulière, de Turin. S’il existe de nombreuses similitudes entre ces deux peintures caractéristiques d’une production en série de ce type d’œuvre, les variantes rencontrées, notamment dans la disposition des anges, montrent l’habileté du peintre à se répéter sans en donner l’impression. Marqué par une veine narrative et la puissance expressive de ses figures, son art revêt des influences vénitiennes comme la frise de chérubins peints dans un camaïeu de bleu. »

Les secrets révélés par sa restauration

« La restauration légère entreprise en amont de la présentation du panneau à l’exposition de Tours a été l’occasion d’intéressantes découvertes. Le tableau décadré a révélé des dimensions différentes de celles d’origine. Recoupé à deux reprises, il conserve un repeint postérieur vraisemblablement du XVIIIe siècle, qui représente des angelots de belle facture habituellement masqués par les écoinçons du cadre(ndlr 1). Si le panneau de bois a souffert des nombreuses attaques d’insectes et que les dorures sont en grande partie usées, la couche picturale et les coloris restent d’une fraîcheur rare pour une pièce ancienne. Cet état de conservation remarquable en fait une œuvre exceptionnelle du patrimoine aquitain et même sur le plan national.

Une telle abondance d’or dans l’œuvre de Simone dei Crocéfissi mérite d’être soulignée. Elle est peut-être à mettre en relation avec l’importance éventuelle de son commanditaire ou du lieu pour lequel ce panneau a été peint »

1

« Le couronnement de la vierge » fut confiné deux fois 

Une première fois à Saint Geyrac

Avant de se retrouver dans l’appartement de Périgueux où Madame Gaillard-Lacombe passa les dernières années de sa vie, il logea au château de Montferrier. Sans doute y tenait-elle beaucoup et connaissait-elle sa provenance, gage de son importance pour le faire suivre avec elle.

 Pendant la guerre de 1939-1945 le couple Gaillard-Lacombe se retira dans un hôtel à Brive .

Le Primitif italien ainsi que les bijoux restèrent  à Saint Geyrac, confiés au régisseur qui devait leur trouver une cachette. Les bijoux enfermés dans une boite furent enterrés au pied d’un arbre.

Mais comment cacher le tableau ? 

Joseph Coulaud démonta une petite partie du plafond dans les communs à côté du château. Il enveloppa confortablement son trésor dans de vieux chiffons et le glissa entre le plafond et le plancher . Il reboucha le trou, ni vu ni connu !

Le tableau dormit ainsi jusqu’à la libération. La cachette était excellente, à l’abri de la lumière et au sec !

La seconde à Périgueux

Il fut exposé en juin 2006 au musée de Périgueux puis mis sous clef.

Pour des raisons de sécurité l’évêché le laissa au musée en attendant qu’on installe pour lui, dans la cathédrale Saint Front un local spécialement aménagé pour sa sécurité et sa conservation.

Pour lui rendre visite dans les réserves du musée, une autorisation de Monseigneur l’Evêque  de Périgueux et Sarlat était nécessaire.

Le voici dans sa boîte sécurisée, présenté à ses deux « groupies » captivées par les explications.

Photo de Peggy Faure, assistante de communication du Musée du Périgord, prise le 25 05 2016. Photo qui m’a été aimablement offerte.

Il est installé depuis peu dans sa demeure définitive de la cathédrale . Je vous conseille vivement de lui rendre une petite visite.

Comment est-il arrivé entre les mains de Madame Gaillard-Lacombe ?

Il était sans aucun doute dans la corbeille de mariage du couple Gaillard-Lacombe et provenait de l’héritage Sancholle-Henraux au décés de Jean-Bernard premier époux.

Et avant ? J’ai envisagé plusieurs hypothèses ; voici la dernière qui peut varier encore au fil des recherches jamais closes.

Plantons le décors ! Nous sommes sous  Napoléon Ier, en Italie .

Les personnages

La sœur de l’empereur, Elisa, nommée Grande Duchesse de Toscane en 1809 .

C’est elle qui donna son essor à Carrare, elle y établit une académie des Beaux-Arts destinée à accueillir les plus grands sculpteurs, et elle fit de Carrare un exportateur de marbres excellents.

Elle y resta le temps de la gloire de son frère. Elle quitta précipitamment la Toscane en 1814 et mourut en 1820.

Jean Baptiste Alexandre Henraux, (1775-1843) ex officier de Napoléon,

Négociant à Paris, il fut chargé de superviser l’achat des marbres blancs de carrare pour les monuments français. C’est ainsi qu’il fut reçu à la cour de la Grande Duchesse.

Le Point de départ possible

Le pillage organisé des œuvres d’art par Napoléon!

            Quand on parle de rapt d’œuvres d’art, on pense à notre époque contemporaine. On pense à Hitler. Mais Napoléon en Egypte, Italie, Espagne et ailleurs pilla sans vergogne.

           Les Français, paraît-il, se seraient comportés un peu mieux en Toscane qu’à Milan ou à Palerme, Rome  ou Venise . Ils n’auraient pillé  que le palais du Grand Duc !

            Paul Marmottan (1856-1932), auteur, historien, critique d’art, collectionneur et mécène nous dit : «  A la bibliothèque du Vatican, les commissaires français avaient pris 500 manuscrits, à Florence ils en enlèvent un seul. »

Au Palais  Pitti où Elisa s’est installée  on décroche 63 tableaux dont 56 pour le Louvre mais 7 se perdirent en route !

On  peut penser que le panneau était dans le groupe des 7 et probablement gardé par Elisa.

Après son départ précipité, les biens d’Elisa furent mis en vente et le panneau a pu être acheté par Jean Baptiste Alexandre Henraux.

Mais J B A Henraux pouvait aussi s’en emparer sans passer par la case Elisa…

Le Primitif, par héritages successifs au sein de▶▶▶ la famille Sancholle-Henraux, échoua chez le couple Bernières Henraux et revint à M N C H Mouilleaux de Bernières lors du décès de son mari.

Il lui revint également un magnifique album offert à Jean Bernard Sancholle-Henraux par Salomon Counis, le peintre attitré de la grande Duchesse Elisa qui porta le titre de « peintre en émail de la cour« .

Extrait du bulletin de la SHAP 3ème livraison de 2021

J M Nicolas, Prêtre du diocèse de Périgueux, historien de l’art, responsable de la Commission diocésaine d’art sacré présente un article sur le Couronnement de la Vierge.( p 265 à 274)

Je vous livre les lignes relatives à l’origine de la donation. Il confirme que le tableau n’est pas un don de Madame Gaillard Lacombe. Par contre j’ai de sérieux doutes sur l’achat de ce tableau par Marcel Chaumont…tous les documents laissent à penser qu’il en a été l’héritier. L’essentiel est qu’il soit entre de bonnes mains!

Il privilégie également la piste de la collection Gozzadini , ce qui amène à penser que c’est Marie Bernières Henraux et son premier mari qui l’on acheté. Une piste évoquée dans une correspondance avec Madame Laure Mallet, membre de la commission diocésaine d’Art Sacré, en 2013 et 2014.

Une réflexion sur “Un trésor inestimable

  1. Ping : Gaillard Lacombe – Saint-Geyrac en Périgord !

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